1. Après notre réunion à 
                Munich en 1982 et en accord avec le Plan adopté par notre 
                Com- mission lors de sa première réunion A Rhodes 
                en 1980, cette quatrième session de la Commission a entrepris 
                de considérer la question de la relation entre foi et communion 
                sacramentelle.
                     2. Comme il a été établi 
                dans le Plan de notre dialogue, approuvé à Rhodes, 
                l'unité dans la foi est un présupposé pour 
                l'unité dans les sacrements et spécialement dans 
                la sainte eucharistie. Mais ce principe communément accepté 
                soulève quelques points fondamentaux qui demandent considération. 
                La foi se ramène-t-elle à adhérer à 
                des formulations ou est-elle aussi quelque chose d'autre? La foi, 
                qui est don divin, doit être comprise comme un engagement 
                du chrétien, engagement de son intellect, de son cur 
                et de sa volonté. Dans sa réalité profonde 
                elle est aussi un événement ecclésial, réalisé 
                et accompli dans et par la communion de l'Église, en son 
                expression liturgique et spécialement eucharistique. Ce 
                caractère ecclésial et liturgique de la foi doit 
                être pris sérieusement en considération.
                     3. Étant donné ce caractère 
                fondamental de la foi, il faut affirmer que la foi doit être 
                prise comme une condition préalable, déjà 
                complète en elle-même, avant la communion sacramentelle, 
                et aussi qu'elle est augmentée par la communion sacramentelle, 
                expression de la vie même de l'Église et moyen de 
                la croissance spirituelle de chacun de ses membres. Cette question 
                doit être posée afin d'éviter une approche 
                déficiente du problème de la foi comme condition 
                de l'unité. Elle ne devrait cependant pas servir à 
                obscurcir le fait que la foi est une telle condition, et qu'il 
                ne peut y avoir de communion sacramentelle sans communion dans 
                la foi, tant au sens large qu'au sens de la formulation dogmatique.
                     4. Outre la question de la foi comme présupposé 
                de la communion sacramentelle et en rapport étroit avec 
                elle, suivant le Plan du dialogue, nous avons également 
                examiné dans nos réunions la relation des sacrements 
                dits de l'initiation  c'est-à-dire le baptême, 
                la confirmation ou chrismation et l'eucharistie  entre eux 
                et avec l'unité de l'Église. À ce point il 
                faut examiner si nos deux Églises sont confrontées 
                simplement à une différence dans la pratique liturgique 
                ou aussi dans la doctrine étant donné que la pratique 
                liturgique et la doctrine sont liées l'une à l'autre. 
                Devons-nous considérer ces trois sacrements comme appartenant 
                à une seule réalité sacramentelle, ou comme 
                trois actes sacramentels autonomes? On doit aussi se demander 
                si pour les sacrements de l'initiation une différence dans 
                la pratique liturgique entre les deux traditions soulève 
                un problème de divergence doctrinale, qui pourrait être 
                considéré comme un obstacle sérieux à 
                l'unité.
               
                I
              FOI 
                ET COMMUNION DANS LES SACREMENTS
               
                     5. La foi est indissociablement don de Dieu 
                qui se révèle et réponse de l'homme qui accueille 
                ce don. C'est la synergie de la grâce de Dieu et de la liberté 
                humaine. Le lieu de cette communion c'est l'Église. En 
                celle-ci, la vérité révélée 
                est transmise selon la tradition des Apôtres, sur la base 
                de l'Ecriture, par les conciles cuméniques, la vie 
                liturgique, les Pères de l'Église, et elle est mise 
                en uvre par les membres du Corps du Christ. La foi de l'Église 
                constitue la norme et le critère de l'acte de foi personnel. 
                La foi n'est pas le produit d'une élaboration et d'une 
                nécessité logiques, mais de l'influence de la grâce 
                de l'Esprit Saint. L'Apôtre Paul a reçu la grâce 
                «dans l'obéissance de la foi» (Rom 1, 5). Saint 
                Basile dit à ce sujet: «La foi précède 
                les discours sur Dieu; la foi et non la démonstration. 
                La foi étant au-dessus des méthodes logiques amène 
                à consentir. La foi ne naît pas de nécessités 
                géométriques, mais des énergies de l'Esprit» 
                (In Ps 115, 1).
                     6. Tout sacrement présuppose et exprime 
                la foi de l'Église qui le célèbre. En effet, 
                dans le sacrement l'Église fait plus que confesser et exprimer 
                sa foi: elle rend présent le mystère qu'elle célèbre. 
                L'Esprit Saint révèle l'Église comme le Corps 
                du Christ qu'il constitue et fait croître. Ainsi l'Église 
                par les sacrements nourrit et développe la communion de 
                foi de ses membres.
              1. 
                La foi véritable est don divin et réponse libre 
                de l'homme
                
                     7. La foi est don de l'Esprit Saint. Par la 
                foi Dieu accorde le salut. Par elle l'humanité a accès 
                au mystère du Christ, qui constitue l'Église et 
                que l'Église communique par l'Esprit Saint qui l'habite. 
                L'Église ne peut que transmettre ce qui la fait exister. 
                Or, il n'y a qu'un mystère du Christ et, le don de Dieu 
                est unique, intégral et sans repentance (Rom 11, 29). Quant 
                à son contenu la foi embrasse la totalité de la 
                doctrine et de la pratique de l'Église relative au salut. 
                Le dogme, la conduite et la vie liturgique s'imbriquent en un 
                tout unique et constituent ensemble le trésor de la foi. 
                Liant d'une façon remarquable le caractère théorique 
                et pratique de la foi Saint Jean Damascène dit: «Cette 
                [foi] est rendue parfaite par tout ce que le Christ a décrété, 
                la foi par les uvres, le respect et la pratique des commandements 
                de Celui qui nous a renouvelés. En effet, celui qui ne 
                croit pas selon la tradition de l'Église catholique ou 
                qui par des uvres incorrectes est en communion avec le diable, 
                est un infidèle» (De fide orthodoxa IV, 10, 83).
                     8. Donnée par Dieu, la foi qu'annonce 
                l'Église est proclamée, vécue et transmise 
                dans une Église locale visible en communion avec toutes 
                les Églises locales dispersées de par le monde, 
                c'est-à-dire l'Église catholique de tous les temps 
                et de partout. L'homme est intégré au Corps du Christ 
                par sa «koinônia» à cette Église 
                visible qui, par la vie sacramentelle et la Parole de Dieu, nourrit 
                en lui cette foi et dans laquelle agit en lui l'Esprit Saint.
                     9. On peut dire que, de cette façon, 
                le don de la foi existe dans l'unique Église dans sa situation 
                historique concrète, déterminée par le milieu 
                et le temps, donc dans tous et chacun des croyants sous la conduite 
                de leurs pasteurs. À travers le langage humain et sous 
                la variété des expressions culturelles et historiques, 
                l'homme doit rester toujours fidèle à ce don de 
                la foi. On ne peut certes prétendre que l'expression de 
                la vraie foi, transmise et vécue dans la célébration 
                des sacrements, épuise la totalité de la richesse 
                du mystère révélé en Jésus-Christ. 
                Toutefois, dans les limites de sa formulation et des personnes 
                qui l'accueillent, elle donne accès à la vérité 
                intégrale de la foi révélée, c'est-à-dire 
                à la plénitude du salut et de la vie dans l'Esprit 
                Saint.
                     10. Selon l'Épître aux Hébreux, 
                cette foi est la «substance des biens que l'on espère, 
                la vision des réalités qu'on ne voit pas» 
                (11, 1). Elle donne part aux biens divins. On la comprend aussi 
                en termes de confiance existentielle en la puissance et en l'amour 
                de Dieu, dans l'acceptation des promesse eschatologiques telles 
                qu'accomplies dans la personne du Seigneur Jésus-Christ. 
                Mais comme l'indique encore cette Lettre aux Hébreux, la 
                foi exige en outre une attitude à l'endroit de l'existence 
                et du monde. Cette attitude est marquée par la disponibilité 
                à sacrifier sa propre volonté et à offrir 
                sa vie à Dieu et aux autres comme le Christ l'a fait sur 
                la croix. La foi associe au témoignage du Christ et «à 
                la nuée des témoins», (12, 1) qui enveloppent 
                l'Église.
                     11. La foi implique donc une réponse 
                consciente et libre de la part de l'homme et un changement continuel 
                de cur et d'esprit. Par conséquent elle est un changement 
                intérieur et une transformation, elle fait demeurer dans 
                la grâce du Saint-Esprit qui renouvelle l'homme. Elle veut 
                la réorientation vers les réalités du Royaume 
                qui vient et qui, dès maintenant, commence à transformer 
                les réalités de ce monde.
                     12. La foi est, présupposée 
                au baptême et à toute la vie sacramentelle qui le 
                suit. Par le baptême, en effet, on participe à la 
                mort et à la résurrection de Jésus-Christ 
                (Rom 6). Ainsi débute un processus qui se poursuit à 
                travers toute l'existence chrétienne.
              2. 
                L'expression liturgique de la foi
                
                      13. Dans l'Église, les sacrements 
                sont le lieu par excellence où la foi est vécue, 
                transmise et professée. Dans la tradition liturgique byzantine, 
                la première prière pour faire un catéchumène 
                demande au Seigneur pour le candidat: «Remplis-le de foi, 
                d'espérance et d'amour envers Toi, afin qu'il comprenne 
                tu es le seul Dieu véritable, avec ton Fils unique, notre 
                Seigneur Jésus-Christ, et ton Esprit Saint». Parallèlement, 
                la première question au'adresse l'Église à 
                un candidat au baptême dans la tradition liturgique latine 
                est: «Que demandes-tu à l'Église?». 
                Et le candidat répond: «La foi».  «La 
                foi que te donne-t-elle? »  «La vie éternelle».
                     14. Nos deux Églises expriment leur 
                conviction en ce domaine par l'axiome: «Lex orandi lex credendi». 
                Pour elles, la tradition liturgique est interprète authentique 
                de la Révélation et par la critère de la 
                profession de la vraie foi. C'est, en effet, dans l'expression 
                liturgique de la foi de nos Églises que le témoignage 
                des Pères et des conciles cuméniques célébrés 
                en commun ne cesse d'être pour le peuple croyant le guide 
                sûr de la foi. Indépendamment de la diversité 
                d'expression théologique, ce témoignage qui lui-même 
                explicite le «kérygme» des saintes Ecritures; 
                est actualisé dans la célébration liturgique. 
                De son côté, la foi proclamée nourrit la prière 
                liturgique du peuple de Dieu.
              3. 
                Le Saint-Esprit et les sacrements
                
                     15. Les sacrements de l'Église sont 
                «sacrements de la foi» où Dieu le Père 
                exauce l'épiclèse dans laquelle l'Église 
                exprime sa foi par cette prière pour la venue de l'Esprit. 
                Le Père y donne son Esprit Saint, qui introduit dans la 
                plénitude du salut en Christ. Le Christ lui-même 
                constitue l'Église comme son Corps. L'Esprit Saint édifie 
                l'Église. Il n'y a pas de don dans l'Église qui 
                ne soit attribuable à celui-ci (Basile le Grand, PG 30, 
                289). Les sacrements sont don et grâce de l'Esprit Saint, 
                en Jésus-Christ dans l'Église. Ceci est exprimé 
                de façon très concise dans une hymne orthodoxe de 
                Pentecôte: «Le Saint Esprit est l'auteur de tout don. 
                Il fait sourdre les prophéties. Il rend parfaits les prêtres. 
                Il enseigne la sagesse aux ignorants. Des pêcheurs il fait 
                des théologiens et il consolide l'institution de l'Église
                     16. Tout sacrement de l'Église confère 
                la grâce du Saint-Esprit en étant, d'une façon 
                indissociable, signe qui remémore ce que Dieu a accompli 
                dans le passé, signe qui manifeste ce qu'il, opère 
                dans le fidèle et l'Église, signe qui annonce et 
                anticipe l'accomplissement eschatologique. Ainsi dans la célébration 
                sacramentelle l'Église manifeste, illustre, confesse sa 
                foi en l'unité du dessein de Dieu.
                     17. On notera que les sacrements ont tous 
                un rapport essentiel à l'eucharistie. Celle-ci est par 
                excellence la proclamation de la foi de laquelle toute confession 
                dérive et à laquelle elle s'ordonne. Elle seule, 
                en effet, proclame pleinement, dans la présence du Seigneur 
                qu'accomplit la puissance de l'Esprit, la merveille de l'uvre 
                divine. Car le Seigneur fait sacramentellement passer son uvre 
                dans la célébration de l'Église. Les sacrements 
                de l'Église transmettent la grâce, expriment et fortifient 
                la foi en Jésus-Christ et sont ainsi des témoignages 
                de la foi.
              4. 
                La foi formulée et célébrée dans 
                les sacrements: les symboles de foi
                
                     18. À l'assemblée eucharistique 
                l'Église célèbre l'événement 
                du mystère du salut dans la prière eucharistique 
                (anaphore) pour la gloire de Dieu. Le mystère qu'elle célèbre 
                est celui-là même qu'elle confesse en accueillant 
                le don salvifique.
                     19. Bien que le contenu et la finalité 
                de cette célébration eucharistique soient demeurés 
                les mêmes dans les Églises locales, celles-ci ont 
                cependant employé des formulations variées et des 
                langues diverses qui, selon le génie des diverses cultures, 
                mettent en relief des aspects et des implications particulières 
                de l'unique événement du salut. Au cur de 
                la vie ecclésiale, à la synaxe eucharistique, nos 
                deux traditions  orientale et occidentale  connaissent 
                ainsi une certaine diversité dans la formulation du contenu 
                de la foi célébrée.
                     20. Depuis les origines, l'administration 
                du baptême est liée à une formulation de la 
                foi par laquelle l'Église locale transmet au catéchumène 
                le contenu essentiel de la doctrine des Apôtres. Ce symbole 
                de la foi énonce sous une forme ramassée l'essentiel 
                de la tradition apostolique, articulé principalement sur 
                la confession de la foi en la Sainte Trinité et en l'Église. 
                Quand toutes les Églises locales confessent la vraie foi, 
                elles transmettent dans le rite du baptême cette unique 
                foi au Père, au Fils et au Saint-Esprit. Toutefois, suivant 
                les temps et les lieux, la formulation a été explicitée 
                de manière différente comme le requéraient 
                les circonstances, en utilisant des termes et des propositions 
                qui n'étaient pas identiques d'un formulaire à l'autre. 
                Mais tous respectaient le contenu de la foi. L'Église d'Orient 
                dans son rituel du baptême emploie le symbole de foi de 
                Nicée-Constantinople. Fidèle à sa tradition 
                propre, l'Église d'Occident transmet au catéchumène 
                le symbole dit «des Apôtres». Cette diversité 
                des formules d'une Église à une autre n'indique 
                en soi aucune divergence sur le contenu de la foi transmise et 
                vécue.
              5. 
                Les conditions de la communion de foi
                
                     21. La première des conditions pour 
                une vraie communion entre les Églises est que chacune se 
                réfère au symbole de foi de Nicée-Constantinople 
                comme norme nécessaire de cette communion de l'unique Église 
                répandue par toute la terre et à travers les siècles. 
                En ce sens la vraie foi est présupposée à 
                une communion dans les sacrements. La communion n'est possible 
                qu'entre Églises qui ont en commun la foi, le sacerdoce 
                et les sacrements. C'est en raison de cette reconnaissance réciproque 
                de l'identité et de l'unicité de la foi (comme, 
                d'ailleurs, de celle du sacerdoce et du sacrement) transmise dans 
                chacune des Églises locales qu'elles se reconnaissent les 
                unes les autres comme véritables Églises de Dieu 
                et que chacun des fidèles est accueilli par les Églises 
                comme frère ou sur dans la foi. Mais en même 
                temps la foi s'approfondit et s'éclaire par la communion 
                ecclésiale vécue en chaque communauté dans 
                les sacrements. Cette qualification ecclésiale de la foi 
                comme fruit de la vie sacramentelle se vérifie à 
                différents niveaux de l'existence ecclésiale.
                     22. En premier lieu, par la célébration 
                des sacrements, l'assemblée proclame sa foi, la transmet 
                et l'assimile.
                     23. En outre, dans la célébration 
                des sacrements, chaque Église locale traduit sa nature 
                profonde. Elle est en continuité avec l'Église des 
                Apôtres et en communion avec toutes les Églises qui 
                partagent la même et unique foi et célèbrent 
                les mêmes sacrements. Dans la célébration 
                sacramentelle d'une Église locale, les autres Églises 
                locales reconnaissent l'identité de leur foi avec la sienne 
                et sont confortées par là dans leur propre vie de 
                foi. Ainsi la célébration des sacrements confirme 
                la communion de foi entre les Églises et la manifeste. 
                C'est pourquoi un fidèle d'une Église locale, baptisé 
                dans cette Église, peut recevoir les sacrements dans une 
                autre Église locale. Cette communion dans les sacrements 
                exprime l'identité et l'unicité de la vraie foi 
                que partagent les Églises.
                     24. Dans la concélébration eucharistique 
                entre représentants des diverses Églises locales, 
                l'identité de la foi est particulièrement manifestée 
                et renforcée par l'acte sacramentel lui-même. C'est 
                pourquoi les conciles, où les évêques conduits 
                par l'Esprit Saint expriment la vérité de la foi 
                de l'Église, sont toujours associés à la 
                célébration eucharistique. Par la proclamation de 
                l'unique mystère du Christ et le partage de l'unique communion 
                sacramentelle, les évêques, le clergé et tout 
                le peuple chrétien unis avec eux sont en mesure de témoigner 
                de la foi de l'Église.
              6. 
                La vraie foi et la communion dans les sacrements
                
                     25. L'identité de la foi est donc un 
                élément essentiel de la communion ecclésiale 
                dans la célébration des sacrements. Mais une certaine 
                diversité de formulation ne compromet pas la «koinônia» 
                entre les Églises locales, lorsque chaque Église 
                peut reconnaître sous la variété des formulations 
                l'unique foi authentique reçue des Apôtres.
                     26. Durant les siècles de l'Église 
                indivise la variété d'expressions théologiques 
                d'une unique doctrine ne mettait pas en péril la communion 
                sacramentelle. Le schisme survenu, L'Orient et l'Occident continuèrent 
                à se développer, mais il le firent séparément 
                l'un de l'autre. Ils n'eurent donc plus la possibilité 
                de prendre unanimement des décisions valables tant pour 
                les uns que pour les autres.
                     27. L'Église comme «colonne et 
                fondement de la vérité» (I Tim 3, 15) garde 
                le dépôt de la foi pur et inaltéré 
                en la transmettant fidèlement à ses membres. Lorsque 
                l'authentique enseignement ou l'unité de l'Église 
                étaient menaces par l'hérésie ou le schisme, 
                l'Église, se basant sur la Bible, la tradition vivante 
                et les décisions des conciles précédents, 
                déclarait dans le concile cuménique la foi 
                droite de manière authentique et infaillible.
                     28. Lorsqu'il est acquis que les différences 
                représentent un rejet des dogmes antérieurs de l'Église 
                et ne sont pas de simples différences d'expression théologique, 
                alors on se trouve clairement confronté à une vraie 
                division sur la foi. Il n'y a plus possibilité de communion 
                sacramentelle. Car la foi doit être confessée par 
                des mots qui expriment la vérité, elle-même. 
                Mais la vie de l'Église peut entraîner de nouvelles 
                expressions verbales de la foi, «une fois pour toutes donnée 
                aux saints» (Jud 3), si de nouveaux besoins historiques 
                et culturels le demandent, avec la volonté explicite de 
                ne pas changer le contenu même de la doctrine. Dans de tels 
                cas, l'expression verbale peut devenir normative pour l'unanimité 
                dans la foi. Ceci exige des éléments de jugement 
                permettant de distinguer entre les développement légitimes, 
                sous l'inspiration du Saint-Esprit, et les autres.
              Ainsi:
                
                     29. La continuité de la tradition: 
                l'Église doit donner à de nouveaux problèmes 
                des réponses appropriées fondées sur l'Écriture 
                et en accord et continuité essentielles avec les énoncés 
                antérieurs des dogmes.
                     30. La signification doxologique de la foi: 
                tout développement liturgique dans une Église locale 
                doit pouvoir être perçu par les autres comme conforme 
                au mystère du salut tel qu'elle l'a reçu et le célèbre.
                     31. La signification sotériologique 
                de la foi: toute expression de la, foi doit viser la destinée 
                finale de l'homme, comme fils de Dieu par grâce, dans sa 
                déification par la victoire sur la mort et dans la transfiguration 
                de la création.
                     32. Si une formulation de la foi contredit 
                l'un ou l'autre de ces critères, elle devient un obstacle 
                à la communion. Si, par contre, telle formulation particulière 
                de la foi ne contredit aucun de ces critères, alors cette 
                formulation peut être considérée comme une 
                expression légitime de la foi, ne rendant pas impossible 
                la communion sacramentelle.
                     33. Ceci exige que la théologie des 
                «theologoumena» soit sérieusement considérée. 
                Il est aussi nécessaire de clarifier quel développement 
                concret, survenu dans une partie de la chrétienté, 
                pourrait être considéré par l'autre partie 
                comme un développement légitime. En outre, on doit 
                reconnaître que souvent le, sens des termes a changé 
                au cours des temps. C'est' pourquoi on doit s'efforcer de comprendre 
                toute formule, selon l'intention de ses auteurs afin de ne pas 
                y introduire des éléments étrangers, ni laisser 
                de côté des éléments qui, selon la 
                pensée des auteurs, allaient sans dire.
              7. 
                L'unité de l'Église dans la foi et les sacrements
                
                     34. Dans l'Église, la fonction des 
                ministres est avant tout de maintenir, garantir et faire croître 
                la communion dans la foi et les sacrements. Ministres des sacrements 
                et docteurs de la foi, les évêques assistés 
                des autres ministres, proclament la foi de l'Église, expriment 
                son contenu et ses exigences pour la vie chrétienne et 
                la défendent contre les interprétations erronées 
                qui fausseraient ou compromettraient la vérité du 
                mystère du salut.
                     35. Les activités caritatives des ministres 
                ou les positions qu'ils assument vis-à-vis des problèmes 
                d'une époque et d'un milieu donné sont inséparables 
                des deux fonctions de l'annonce et de l'enseignement de la foi, 
                d'une part, de la célébration du culte et des sacrements, 
                de l'autre.
                     36. De la sorte, l'unité de foi à 
                l'intérieur d'une Église locale et entre les Églises 
                locales a pour garant et juge l'évêque, témoin 
                de la tradition, en communion avec son peuple. Elle est inséparable 
                de l'unité de la vie sacramentelle. La communion dans la 
                foi et la communion dans les sacrements ne sont pas deux réalités 
                distinctes. Elles sont deux aspects d'une unique réalité 
                que l'Esprit Saint promeut, accroît et sauvegarde auprès 
                des fidèles.
              
                II
              LES 
                SACREMENTS DE L'INITIATION CHRÉTIENNE:
                LEUR RELATION À L'UNITÉ DE L'ÉGLISE
              
               
                
                      37. L'initiation chrétienne est un 
                tout dans lequel la chrismation est la perfection du baptême 
                et l'eucharistie l'achèvement des deux.
                      L'unité du baptême, de la chrismation 
                et de l'eucharistie en une seule réalité sacramentelle 
                ne nie pas, cependant, leur spécificité. Ainsi le 
                baptême dans l'eau et dans l'Esprit est la participation 
                à la mort et la résurrection du Christ et la nouvelle 
                naissance par la grâce. La chrismation est le don de l'Esprit 
                au baptisé comme don personnel. Reçue dans les conditions 
                requises, l'eucharistie par la communion au Corps et au Sang du 
                Seigneur donne la participation au royaume de Dieu, incluant le 
                pardon des péchés, la communion à la vie 
                divine elle-même et l'appartenance à la communauté 
                eschatologique.
                      38. L'histoire des rites baptismaux en Orient 
                et en Occident, comme aussi la manière dont nos Pères 
                communs interprétaient la signification doctrinale des 
                rites, montrent clairement que les sacrements d'initiation forment 
                une unité. Cette unité est fortement affirmée 
                par l'Église orthodoxe. De son côté, l'Église 
                catholique la maintient elle aussi. Ainsi le nouveau Rituel romain 
                d'initiation déclare que «les trois sacrements de 
                l'initiation chrétienne sont si étroitement unis 
                qu'ils amènent les fidèles à la pleine capacité 
                de remplir par l'Esprit la mission qui appartient dans le monde 
                à toute l'assemblée du peuple chrétien» 
                (Prenotanda Generalia, n. 2).
                      39. Le modèle de l'administration 
                des sacrements qui s'est développé très tôt 
                dans l'Église révèle comment celle-ci comprenait 
                les différentes étapes de l'initiation comme accomplissant, 
                théologiquement et liturgiquement, l'incorporation au Christ 
                par l'entrée dans l'Église et la croissance en Lui 
                par la communion à son Corps et à son Sang dans 
                cette Église. Tout cela est effectué par le même 
                Saint-Esprit qui constitue le croyant comme membre du Corps du 
                Seigneur.
                      40. Ce modèle ancien incluait les 
                l'éléments que voici:
                      41. 1. Pour les adultes, une période 
                de probation spirituelle et d'instruction au cours de la quelle 
                les catéchumènes étaient formés pour 
                leur incorporation définitive à l'Église;
                      42. 2. le baptême par l'évêque, 
                entouré des prêtres et des diacres, ou administré 
                par les prêtres assistés des diacres, précédé 
                d'une profession de foi et de diverses intercessions et actions 
                liturgiques;
                      43. 3. la confirmation ou chrismation par 
                l'évêque en Occident, par le prêtre, lorsque 
                l'évêque était absent en Orient, au moyen 
                de l'imposition des mains ou de l'onction du saint chrême 
                ou par les deux.
                      44. 4. la célébration de la 
                sainte eucharistie durant laquelle les nouveaux baptisés 
                et confirmés étaient admis à la pleine participation 
                au Corps du Christ.
                      45. Ces trois sacrements étaient administrés 
                au cours d'une seule célébration liturgique complexe. 
                Suivait une période d'ultérieure maturation catéchétique 
                et spirituelle par l'instruction et la fréquente participation 
                à l'eucharistie.
                      46. Ce modèle demeure l'idéal 
                pour les deux Églises, puisqu'il correspond le plus exactement 
                possible à l'appropriation de la tradition scripturaire 
                et apostolique, uvre des Églises chrétiennes 
                primitives qui vivaient en pleine communion les unes avec les 
                autres.
                      47. Le baptême des enfants, qui a été 
                pratiqué depuis les origines, devint dans l'Église 
                la procédure la plus habituelle pour l'introduction de 
                nouveaux chrétiens à la pleine vie de l'Église. 
                D'autre part, certains changements locaux se firent dans la pratique 
                liturgique, en considération des besoins pastoraux des 
                fidèles. Ces changements n'ont pas affecté la compréhension 
                théologique de l'unité fondamentale, dans le Saint-Esprit, 
                de tout le processus de l'initiation chrétienne.
                      48. En Orient, on a retenu l'unité 
                dans le temps de la célébration liturgique des trois 
                sacrements, soulignant ainsi l'unité de l'uvre du 
                Saint-Esprit et la plénitude de l'incorporation de l'enfant 
                à la vie sacramentelle de l'Église.
                      En Occident, on a souvent préféré 
                reporter la confirmation de manière à retenir le 
                contact du baptisé avec l'évêque. Ainsi les 
                prêtres ne furent pas ordinairement, habilités à 
                confirmer.
                      49. Les points essentiels de la doctrine 
                du baptême sur lesquels les deux Églises sont unanimes 
                sont les suivants:
                           1. la nécessité 
                du baptême pour, le salut;
                           2. les effets du baptême, 
                en particulier la vie nouvelle en Christ et la libération 
                du péché originel;
                           3. l'incorporation à 
                l'Église par le baptême;
                           4. la relation du baptême 
                au mystère de la Trinité;
                           5. le lien essentiel 
                du baptême avec la mort et la résurrection du Seigneur;
                           6. le rôle de l'Esprit 
                Saint dans le baptême;
                           7. la nécessité 
                de l'eau qui manifeste le caractère du baptême comme 
                bain de la nouvelle nais-sance.
                      50. Entre les deux Églises il existe 
                par ailleurs des différences concernant le baptême:
                           1. le fait que l'Église 
                catholique, tout en reconnaissant l'importance primordiale du 
                baptême par immersion, pratique habituellement le baptême 
                par infusion;
                           2. le fait que dans l'Église 
                catholique un diacre puisse être ministre ordinaire du baptême.
                      51. De plus, dans certaines Églises 
                latines, pour des raisons pastorales, par exemple pour mieux préparer 
                les confirmands au seuil de l'adolescence, l'usage s'est peu à 
                peu répandu d'admettre à la première, eucharistie 
                des baptisés n'ayant pas encore reçu la confirmation, 
                et pourtant les directives disciplinaires qui rappelaient l'ordre 
                traditionnel des sacrements d'initiation chrétienne n'ont 
                jamais été abrogées. Cette interversion, 
                qui provoque des objections ou des réserves compréhensibles 
                tant chez les Orthodoxes que chez des Catholiques romains, appelle 
                à une réflexion théologique et pastorale 
                approfondie parce que la pratique pastorale ne doit jamais oublier 
                le sens de la tradition primitive et son importance doctrinale. 
                Il faut, d'ailleurs, rappeler ici que le baptême conféré 
                à partir de l'âge de raison dans l'Église 
                latine est toujours suivi désormais de la confirmation 
                et de la participation à l'eucharistie.
                      52. En même temps, les deux Églises 
                sont préoccupées de la nécessité d'assurer 
                la formation spirituelle du néophyte dans la foi. Pour 
                cela, elles tiennent à souligner, d'une part, qu'il y a 
                un lien nécessaire entre l'action souveraine de l'Esprit, 
                réalisant par les trois sacrements la pleine incorporation 
                de la personne à la vie de l'Église, la réponse 
                de celle-ci et celle de sa communauté de foi, d'autre part, 
                que la pleine illumination de la foi n'est possible que lorsque 
                le néophyte, quel que soit son âge, a reçu 
                les sacrements de l'initiation chrétienne.
                      53. On rappelle, enfin, que le Concile de 
                Constantinople, célébré conjointement par 
                les deux Églises en 879-880, a établi que chaque 
                siège conserverait les anciennes coutumes de sa tradition, 
                l'Église de Rome conservant les coutumes qui lui sont propres 
                et l'Église de Constantinople les siennes, et également 
                les trônes de l'Orient (cf. Mansi XVII, 489 b).
              Cassano 
                delle Murge (Bari), Oasi Santa Maria, le 16 juin 1987.
              [Service 
                d'Information 64 (1987/II) 86-91.]